Si l’impact carbone du monde de la construction est aujourd’hui bien connu, les réponses pour renverser ce phénomène sont encore très insuffisantes au vu du défi que représente la crise climatique actuelle. Cette préoccupation est ainsi au centre de nos pratiques mutuelles. Nous nous attachons particulièrement à la durabilité des constructions mais aussi à leur réversibilité. Dans cette optique, l’attention portée à tout le cycle de vie du bâtiment, de sa construction à sa disparition et à chacun des matériaux utilisés nous importe grandement. C’est pourquoi nous favorisons dans nos pratiques la réhabilitation à la construction neuve.
Travaillant tous les deux dans la restauration du patrimoine, nous constatons tous les jours la pertinence des constructions anciennes d’un point de vue écologique. En effet, si nous tentons aujourd’hui de réfléchir de nouveau de manière locale pour construire, la question ne se posait pas avant la mondialisation. La difficulté de transport des biens impliquait naturellement une économie de moyens et un recours aux ressources les plus locales possibles, provenant souvent du terrain même de la construction et se poursuivait par une transformation minimale de ces ressources pour construire. Le panel de matériaux utilisés était ainsi restreint aux plus simples et essentiels : le bois, la pierre et la terre.
conserver une connaissance fine de ces techniques constructives afin de s’en inspirer et de les réinterpréter au service de la construction contemporaine
Le patrimoine bâti ne peut aujourd’hui pas toujours répondre aux attentes contemporaines notamment au niveau des réglementations thermiques ; pourtant, il nous semble nécessaire de conserver une connaissance fine de ces techniques constructives afin de s’en inspirer et de les réinterpréter au service de la construction contemporaine.
C’est ainsi au point de réunion entre nos deux formations, la restauration du patrimoine pour Anna (OPRP) et l’éco-construction pour Elouan (OPEC) que naît le projet Terres d’Argiles. Tous les deux passionnés par la mise en oeuvre des matériaux anciens, Elouan travaille le bois, Anna principalement la pierre, nous nous retrouvons donc autour du matériau terre, fascinant de par ses possibilités constructives, de confort d’habitat (thermique et hygrométrique) mais surtout pour sa pertinence écologique lors- qu’il est travaillé cru (extraction sur place, peu de transformation, recyclage infini...).
C’est également parce que la terre est encore souvent considérée comme un matériau impropre, pauvre, contrairement à la pierre et au bois considérés comme nobles que celui-ci nous tient particulièrement à cœur.
Les différentes techniques constructives en terre crue sont assez bien connues et documentées en France par les professionnels du bâti ancien et de l’éco-construction. On connaît également beaucoup d’exemples en Afrique subsaharienne, en Afrique de l’ouest, en Amérique du sud ou encore dans les pays du Golfe comme au Yemen où l’exemple des gratte-ciel en terre millénaires de Shibam sont des modèles incontournables de l’architecture en terre crue dans le monde. Pourtant nous avons réalisé que notre connaissance personnelle des constructions en terre crue en Europe était quasiment inexistante à l’exception de quelques projets comme cob’bauge par exemple.
réaliser un voyage en Europe pour découvrir, se former et documenter les techniques constructives de la terre crue
Partis de ce constat, l’idée de réaliser un voyage en Europe pour découvrir, se former et documenter les techniques constructives de la terre crue dans ses différentes régions a commencé à grandir en nous. Nous avons alors entrepris de dresser un état de l’art sur ce sujet et nous sommes constitués une bibliographie dont les sources principales sont trois ouvrages complémentaires, Terra incognita (découvrir et préserver) ainsi que Terra Europae datant respectivement de 2008 et 2013, initiés par Craterre et l’Ecole d’Avignon en partenariat avec des universités européennes. Une cartographie des différentes techniques constructives a notamment été réalisée sur laquelle nous nous basons pour programmer notre itinéraire.
Nous nous sommes également intéressés aux différents prix décernés à la promotion de l’architecture en terre crue contemporaine comme Terra Fibra ou les Terra Awards. Ils nous ont permis de constater la forte prédominance du pisé dans le paysage architectural de la terre crue
contemporaine, ainsi que des adobes. En effet, le torchis et la bauge, étant les deux techniques essentiellement présentes dans le patrimoine en terre crue breton, semblent invisibilisés dans l’architecture contemporaine en terre crue au profit du pisé et des adobes.
Nous souhaitons donc par le projet terres d’argiles, nous concentrer sur les techniques locales de construction bretonne, la bauge et le torchis et d’en apprendre plus sur la diversité de mise en œuvre de ces techniques dans le reste de l’Europe.
L’objectif de ce projet sera donc une actualisation des données récoltées dans Terra Europae mais également une approche plus concrète, centrée sur l’artisanat et les savoir-faire techniques autour du chantier.
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